LES MOTIVATIONS DES PLANTEURS

Publié le par ONG ABC AU PLANTEUR


Quel qu'en soit le critère, la qualité impose au producteur des conditions, pureté des matières premières, travail minutieux, assomption de risques, qui augmentent les prix de revient. Sauf quelques exceptions, les producteurs n'acceptent ces charges supplémentaires que s'ils y ont intérêt ou s'ils y sont obligés, incitation économique par l'intermédiaire des prix, eux-mêmes dépendant des mécanismes économiques naturels ou de l'intervention de l' Etat, incitation juridique par la contrainte publique, d'essence gouvernementale mais souvent d'initiative professionnelle.

A. Les mécanismes naturels.


Sur le marché, les produits de bonne ou de mauvaise qualité sont apportés par les offreurs mais cette offre doit en principe s'adapter aux désirs des consommateurs. C'est donc l'analyse de l'évolution de la demande qui permet de caractériser les forces qui jouent en faveur ou au détriment de la qualité. Faible et même quelquefois négative par effet de substitution pour les produits de consommation courante, l'élasticité de la demande par rapport au revenu est d'autant plus forte que les biens s'élèvent dans la hiérarchie des besoins du consommateur' analyse de MM. Cépède et Lengellé (5), qui envisagent l'ensemble des produits, pourrait être adaptée à l'étude des diverses qualités d'un même produit. Dans une économie en croissance, deux effets se conjugent à l'avantage de la qualité sur le marché.
L'augmentation de la production accentue la concurrence à la vente. L'accroissement des revenus entraîne des phénomènes de substitution de consommation ; cet effet est d'autant plus sensible que la croissance est souvent accompagnée d'une fermeture de l'éventail des revenus, c'est-à-dire stagnation des classes à hauts niveaux de vie dont la consommation en produits de luxe approchait de la saturation et ascension « d'une clientèle simplement aisée, née du nivellement des revenus » que le professeur Fromont espère « gagner à la cause du produit de qualité » (6). Transposant cette idée sur le plan du commerce extérieur, le professeur Fromont estime que nous devons conserver à l'étrange marchés de biens de luxe malgré la disparition des très grosses fortunes ; au lieu de vendre 100 bouteilles de champagne, par an et par personne, à 110 privilégiés, nous en vendrons 10 à 100 et peut-être 1 000 clients devenus aisés. Une autre conséquence de l'évolution économique sociale liée à la croissance c'est l'augmentationnel active du coût du facteur travail qu'il faut donc chercher à économiser. De là le remplacement des aliments à cuisson lente par des aliments à cuisson rapide, ce qui permet d'ailleurs aussi une économie de combustible, les appareils à chauffage discontinu remplaçant les appareils à chauffage continu.
Le marché de la viande de boeuf semble refléter depuis une dizaine d'années cette évolution ; à partir de 1953, on a constaté une hausse sensible des prix de toutes les qualités, ainsi qu'un écart croissant d'une part entre les diverses qualités cotées à la Villette, d'autre part entre deux catégories, ni celle de la diminution de l'offre à partir de 1953,
il est certain que l'accToissement des revenus réels des classes relativement défavorisées (300 à 400 milliards de francs 1952) a beaucoup contribué à la hausse des cours et surtout a été déterminante dans
l'ouverture de l'éventail des prix. Mais tous les marchés ne sont pas aussi « fluides m et l'évolution de la demande ne se traduit pas toujours aussi fidèlement par une variation de prix. La rigidité peut avoir des causes diverses ; une situation de pénurie peut créer une prime à la mauvaise qualité ; la classification en fonction de la qualité peut être difficile ou exiger des manipulations coûteuses (les oeufs par exemple) ; le secteur industriel et commercial peut abuser de sa situation oligopolistique, profiter des écarts de prix au détail et aligner par le bas les prix à la production.
Plusieurs groupements professionnels insistent sur la faiblesse des écarts de prix entre bonne et mauvaise qualité. Ils seraient souvent insuffisants pour compenser les risques et les charges d'une production plus soignée. Cela fut longtemps le cas des houblons payés au cultivateur alsacien d'après les cours des qualités inférieures et revendus beaucoup plus cher aux brasseurs français avec une étiquette étrangère. C'est le cas du chanvre actuellement ; les producteurs n'obtenant pas une différenciation suffisante des prix abandonnent les variétés dioïques dont la finesse est supérieure, et cultivent les variétés monoïques plus grossières mais dont le rendement est plus élevé.
Pour le lin, le phénomène est un peu différent. C'est l'évolution propre de la demande qui conduit à une baisse de la qualité. Le lin est de moins en moins utilisé pour la fabrication des tissus fins (linon, batiste) et de plus en plus employé pour de3 toiles grossières, bâches, sacs. Les filasses fines ne sont donc pas particulièrement appréciées et l'objectif essentiel des producteurs, c'est l'augmentations rendements au détriment de la finesse. Enfin, les différences de prix peuvent ne pas entraîner une amélioration de la qualité tout simplement parce que les producteurs n'en ont pas conscience ou bien parce qu'ils ne sont pas assez dynamiques pour s'y adapter. La plupart du temps, ces déséquilibres consécutif à la rigidité du système économique inciteront les organisations professionnelles ou le gouvernement  à in tervenir pour rétablir l'équilibre et, par la protection ou par la promotion de la qualité, à en favoriser le dynamisme.

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